Itérations à ARPRIM

ARPRIM, Itérations, Shannon Collis, Shawn Reynar

Après les expositions très colorées de Philippe Blanchard et de Dominique Pétrin présentées à ARPRIM cette année, l’organisme accueille cette fois l’univers plus sobre des artistes américains Shannon Collis et Shawn Reynar. Le projet s’appelle Itérations, et pour ceux qui seraient curieux, j’ai fait le travail pour vous et ai cherché la définition du terme (sur Wikipédia, il va sans dire). Il semblerait donc qu’une itération soit l’action de répéter un processus dans le but d’atteindre un résultat, en langage mathématique. Voilà. Vous êtes du coup plus savants et moi aussi. Mais ce qui est merveilleux, c’est que le titre est évidemment tout indiqué pour expliquer le concept de l’exposition.

Pour arriver à leurs fins, les deux artistes ont utilisé la répétition de l’impression — pour reprendre la construction de la définition — comme partie intégrante d’une expérimentation auditive. Ils ont en effet développé une installation sonore composée de rouleaux transparents sur lesquels des formes noires contrastant avec le fond ont été préalablement imprimées. Ces huit bandes déroulent ensuite devant des lecteurs transformant l’information visuelle en information sonore. Bref, à chaque passage d’un trait noir devant le lecteur, un son est produit, ce qui crée une sorte de partition erratique. Le résultat est loin d’être mélodique, se rapprochant beaucoup plus d’un amalgame mécanique que d’une symphonie, mais l’ambiance est singulière. Le « tac » incessant est hypnotique, et le parcours des formes sur notre rétine ajoute à cette rassurante rengaine. Par moments, on a même l’impression d’assister un phénomène optique interne, comme si notre vision se brouillait ou qu’un point noir venait obstruer notre vue. Pour vivre avec ce genre de problème au quotidien, je dois dire que l’effet (qu’il ait été désiré ou non) était plus qu’intéressant.

Les dispositifs ont été laissés apparents, et en général, j’apprécie ces présentations sans flafla. Toutefois, dans ce cas-ci, l’ensemble m’a semblé manquer un peu de finesse, et les reflets de l’éclairage sur les rouleaux accentuaient cette petite maladresse. Le reste est aussi beaucoup plus convenu, les artistes ayant choisi d’exposer une série d’impressions encadrées sobrement sur les murs inoccupés de la galerie. Les motifs répétés sur les bandes transparentes y sont alors réutilisés dans de beaux agencements où la couleur a aussi été ajoutée avec parcimonie.

Somme toute, il est intéressant de voir la fusion de pratiques différentes, et en jetant un coup d’Å“il aux sites personnels des deux artistes, on voit tout de suite comment se construit ce partenariat. D’ailleurs, l’exploration de ces cursus distincts rend l’expérience d’autant plus fascinante. On repère immédiatement la façon de faire de Reynar dans les impressions encadrées et celle de Collis dans l’ingéniosité de l’installation sonore. Or, bien que le travail de collaboration se fasse résolument sentir, le caractère propre à chacun des artistes ressort très fortement, et il serait presque tentant de scinder la pièce afin d’apprécier chaque univers séparément.

On espère donc revoir d’autres tentatives du duo dans un avenir rapproché, qui seraient peut-être à même de changer l’équation 1+2=1+2 en 1+2=3, pour rester dans les mathématiques. Bref, il serait bien d’arriver à créer une Å“uvre collective s’éloignant un peu plus des projets personnels de chacun, mais somme toute, le résultat présenté à ARPRIM en ce moment vaut le détour, et je vous invite à aller en juger par vous-mêmes.

ARPRIM, espace 426
Shannon Collis et Shawn Reynar
Itérations
15 mars au 20 avril 2013
www.arprim.org


Print pagePDF pageEmail page

Submit a comment