Il y a bien longtemps que Marie-Maude Polychuk, l’une des fondatrices de la galerie Rats 9, m’avait glissé un mot sur l’exposition Néofolk qu’elle organisait avec une foule d’autres artistes. Les mots clés inclus dans leur appel à propositions m’avaient bien plu. On y parlait de vente de garage, de kitsch soviétique, d’objets trouvés, d’art outsider, de bazar, de taxidermie, de célébration païenne, de chalet québécois, de tableau de famille et j’en passe. Bref, l’invitation lancée aux artistes était très large, mais aussi très inspirante, et le résultat qui en découle l’est tout autant.Â
L’exposition Néofolk est chargée, très chargée, avec des Å“uvres bidimensionnelles du plancher au plafond et des Å“uvres tridimensionnelles postées un peu partout au centre et sur les côtés, ce qui rappelle inévitablement les grands salons d’art parisiens. Il me serait donc assez difficile de vous parler de tous les artistes qui y ont exposés, mais évidemment, certains ont retenu mon attention. Au départ, je dois dire que j’avais l’impression que je ne viendrais jamais à bout de tout ce qu’il y avait à voir, mais on se laisse rapidement prendre au jeu. On commence par regarder un pan de mur, nos yeux butinent d’Å“uvre en Å“uvre, et au bout du compte, on a tout vu et on revient vers quelques coups de cÅ“ur pour un dernier coup d’Å“il. Bref, à mon avis, la densité de l’exposition ne fait pas se perdre les pièces présentées, mais leur donne au contraire une petite place particulière où l’intimité est d’autant plus présente lors du rapport au spectateur.Â
Pour ma part, j’ai particulièrement apprécié les Å“uvres de Jesse Colette, fins alliages de matériaux trouvés, comme cette patte de cervidé jointe à un piédestal de bois, à un morceau de cuir travaillé et à quelques plumes. Le résultat est très cohérent et s’inscrit tout à fait dans l’idée du néofolk. Dans un autre style totalement, j’ai beaucoup aimé la vidéo de Stéphanie St-Jean Aubre, La cassette oubliée, présentant des suites de mots sur Post-it faisant référence à des souvenirs, des moments précis, des flashs du passé. La superbe photo d’Emily J. Hara située juste au-dessous cadrait d’ailleurs très bien dans cette idée de nostalgie, de souvenir, et créait une atmosphère très singulière. Les icônes religieuses d’Iris, de sa série Psychopompe et les autres, m’ont aussi fait beaucoup sourire par leur causticité, et celles de Richard Suicide, les Madones de la rue Dorion, crées selon une approche esthétique tout à fait différente et très réussie, s’inscrivaient aussi dans cette lignée. Le Folded Poster No. 1 (Boris Karloff) de Gary Lapointe se démarquait aussi de par son renvoi automatique à l’adolescence, à la chambre, à l’idolâtrie juvénile, tandis que les six petites toiles de Maggie Higgins déconstruisant la crise de larmes d’un bébé renvoyaient quant à elles à nos premiers moments.
J’aurais pu continuer à citer de nombreux coups de cÅ“ur, parce qu’il y en a eu beaucoup plus, mais ce qui est à retenir, c’est qu’il y en a définitivement pour tous les goûts et que vous retirerez probablement beaucoup de plaisir à vous faufiler le regard parmi tout ce fouillis, d’autant plus que des objets divers ont été ajoutés à l’exposition, tels des points de croix, des vieilles photos, une courtepointe et beaucoup d’autres petites trouvailles. Je vous invite donc à aller faire votre tour et à découvrir du même coup la galerie Rats 9 si ce n’est pas déjà fait.
Rats 9, espace 530
Scott Alexander, Iris Boudreau, Christine Brezina, Marie-Cécile Bouchard, Jesse Colette, Grant Cunningham, Delphine Delas, Tara Desmond, Nadia Duquette, Alisha Fisher, Geneviève Giroux, Isabelle Guichard, Emily J. Hara, Céline Hémond, Harry Herbert, Carly Higgins, Maggie Higgins, Danielle Jakubiak, Jonne Kauko, Fabrice Landry, Nathan Lang, John Lanthier, Gary Lapointe, Brendon O’Neill, Isa Pardi, Jennie Philpott, Marie-Maude Polychuck, Val Polychuck, Gilles Roy, Jessica Roy, Stéphanie St-Jean Aubre, Richard Suicide, Jeff Torgerson, Adèle Tobin.
Néofolk
21 septembre au 13 octobre
http://rats9.com/